Elisabeth Von Herzogenberg

 

Pour le plaisir de la découverte d'Elisabeth Von Herzogenberg, par Bertrand Dicale sur France Musique

Propos retranscrits plus bas

Aujourd’hui, 7 janvier, je voudrais vous parler d’Elisabeth Von Herzogenberg, morte le 7 janvier 1892 à l’âge de quarante-quatre ans. 
Quand on essaie de comprendre pourquoi les compositrices sont si massivement reléguées aux marges de l’histoire de la musique, les spécialistes contemporains disent qu’il y a deux raisons principales : les femmes dans la musique sont assignées à des rôles d’épouse ou de muse et, de toute manière, il leur est dénié la possibilité d’apparaître librement dans l’espace public. 
Elisabeth von Herzogenberg (1847-1892) coche toutes les cases. Elle est l’épouse d’un compositeur, Heinrich von Herzogenberg, la muse de Johannes Brahms et il n’est pas convenable pour une femme de la noblesse allemande, de se produire en public – et c’est pour cela qu’elle ne donnera jamais vraiment de concert, à part au salon, pour quelques amis qui constateront que ses talents de pianiste sont immenses. De même, il faut rendre grâce à son mari d’avoir fait éditer, après sa mort, ses 8 Pièces pour piano, seules rescapées de son œuvre de compositrice.

 


Son père avait pris des cours de piano avec Frédéric Chopin. Quand il est en poste à Vienne, Elisabeth prend des leçons avec Julius Epstein (1832-1926) que l’on dit être le plus grand professeur de piano d’Autriche. Elle est une blonde ensorcelante, selon les sources de l’époque et elle devient l’élève de Johannes Brahms qui la renvoie aussitôt à son professeur, disant qu’il lui est impossible de l’avoir comme élève… c’est l’amour !
Brahms attendra quelques années.
Elisabeth Von Stockhausen deviendra Von Herzogenberg en 1868, à 21 ans, et ce ne sera que quelques années plus tard qu’elle recroisera Johannes Brahms qui devient un ami du couple. Heinrich Von Herzogenberg est professeur de composition, grand défenseur de l’œuvre de Jean-Sébastien Bach, compositeur classique assez conventionnel, mais assez exalté.
La correspondance de Brahms avec les Herzogenberg est un document passionnant pour l’histoire de la musique. Il confie à Elisabeth ses incertitudes esthétiques et sa quête éperdue de l’assentiment d’une dame idéale à qui il dédie plusieurs de ses œuvres. C’est ce qu’on appelle une muse.
Elisabeth travaille discrètement, fait des arrangements pour des chansons folkloriques pour des enfants des écoles, chante en privé. Elle est de santé fragile (le cœur) et son mari est fragile aussi. Ils passent l’hiver à San Remo, où elle meurt, 10 ans après avoir écrit les 8 pièces pour piano, tout ce qui reste de son œuvre.

Les Rhapsodies pour piano, op. 79 ont été écrites par Johannes Brahms en 1879 et font partie des pièces de la maturité. Elles ont été dédiées à Elisabeth von Herzogenberg. C'est à la suggestion de cette dernière que Brahms, bien que peu enthousiaste, changea le titre de ces pièces de Klavierstücke en Rhapsodies.