NEO-CLASSICISME

 

(Wikipedia)

Le néo-classicisme, en musique, est un mouvement ayant émergé à la sortie de la Première Guerre mondiale en réaction à l'impressionnisme, au romantisme et à l'expressionnisme. Ce mouvement fut particulièrement influent durant l'entre-deux-guerres. Il se caractérise d'une façon générale par une référence plus ou moins marquée à la tradition musicale occidentale, en renouant avec des procédés d'écriture anciens, aussi bien harmoniques que contrapuntiques.

Mais la référence à la tradition y est plus large que ne le laisse entendre le terme « néoclassique ». Son emploi recouvre, en effet, un ensemble hétéroclite d'approches musicales de l'entre-deux-guerres, ayant en commun de se référer aussi bien à la musique classique, à la musique baroque, qu'aux polyphonistes du Moyen Âge et de la Renaissance. Comme l'observent de nombreux musicologues, la désignation de « néoclassique » en musique reste souvent imprécise et ambiguë. Le terme est souvent employé pour désigner des tendances stylistiques de l'époque parfois très différentes les unes des autres. Car, selon Christian Goubault, « il n'existe pas à proprement parler d'esthétique néo-classique commune ». La notion du néoclassicisme en musique pose donc de nombreuses difficultés de définition.

Parmi les compositeurs les plus marquants de ce mouvement on peut citer Igor Stravinsky, Sergueï Prokofiev, Maurice Ravel, Ottorino Respighi, Francis Poulenc, Bohuslav Martinů, Aaron Copland, Paul Hindemith. Dans une acception plus générale de la notion de néoclassicisme, on peut aussi inclure des compositeurs comme Béla Bartók, Arnold Schönberg ou Erik Satie.

 

Christian Accaoui (professeur d'esthétique au CNSM de Paris) écrit :

« L’esthétique du divertissement des années 1920, [est] née également après la guerre, à un moment où il faut reconstruire et tirer des leçons des échecs, des excès[...]. Cocteau renvoie dos à dos le postromantisme et l’impressionnisme de Debussy. […] Son modèle est Satie, incarnant la simplicité et l’humour dans l’art. Il faut bien convenir que la musique du groupe des Six (composé de Milhaud, Poulenc, Honegger, Tailleferre, Auric et Durey) multiplie les références au passé sans qu’elles soient exclusivement classiques, et que cette association derrière un manifeste fut purement artificielle, et par là même la destinée à éclater. L’érotisme de Poulenc, son goût pour les ornements le situent davantage du côté rococo d’Antoine Watteau, de Jean-Honoré Fragonard ou de François Boucher que du côté du néoclassicisme. On trouve autant de références au baroque qu’au classicisme de Mozart. Certains musicologues embarrassés ont ainsi eu recours à l’adjectif « néobaroque » pour désigner les œuvres incluant des références à Bach, ce qui n’a pas plus de sens. Que faire alors de l’influence déterminante du jazz ? Tandis que le classicisme des lumières était universaliste, le néoclassicisme de l’entre-deux guerres fut protéiforme : comment ranger sous une même étiquette le groupe des six, le Stravinsky de l’après-période russe et de l’avant-période sérielle (celui des « retour à ») Prokofiev, Falla, le Ravel du Tombeau de Couperin de la Sonatine et des deux concertos, Reger, Hindemith, Martinů ? Tout musicien faisant un retour même temporaire à une tonalité ou à une modalité trop affirmée, à des thèmes avec des cadences et une armure régulière, usant de formes anciennes (forme-sonate classique ou danse baroques) encourt ce qualificatif. Même les œuvres américaines de Bartók et de Schönberg n’y échappent pas. »

Le musicologue Makis Solomos écrit, quant à lui :

« Deux définitions s'offrent, l'une reposant sur un critère atemporel, l'autre adoptant un point de vue historique. Selon la première, serait néoclassique toute œuvre qui, indépendamment de son ancrage historique, revient aux formes et aux techniques d'époques antérieures, notamment de l'époque classique, centrale à l'histoire de la musique tonale : c'est en ce sens que l'on parle couramment d'un Brahms néoclassique (indissociable, le plus souvent, du Brahms romantique). L'autre, [...] se limite au néoclassicisme historique. Dans ce sens, le mot désigne un mouvement musical qui détermine, en grande partie, les années 1920-30. La première utilisation du terme « néo- classique » pour nommer un mouvement artistique de ces deux décennies appartient aux arts plastiques. On parle de la période « néoclassique » de Picasso lorsque, vers le début des années 1920, celui-ci s'essaie aux portraits « précieux » à la manière d'Ingres (avec notamment sa série des Arlequin de 1923). Le mouvement semble se généraliser à la fin des années 1920 quand un impérieux besoin de « retour à l'ordre » - le « désordre » stigmatisant la modernité du fauvisme, de l’expressionnisme, du cubisme, du constructivisme, etc. - s'empare de plusieurs courants artistiques : le « Novecento » en Italie, la « Jeune Peinture Française » dans l'hexagone ou la « Nouvelle Objectivité » en Allemagne. Retour à l'ordre : tel serait aussi, me semble-t-il, l'ambition la plus générale du néoclassicisme musical historique. En effet, ce dernier se présente d'abord comme une réaction à l'encontre des innovations de la première modernité musicale. »

 

Quelques exemples

Sinfonietta, 1947, de Francis Poulenc (1899-1963) en hommage à Joseph Haydn (1732-1809 ), compositeur classique autrichien

 

Concerto pour deux pianos, 1930, de Francis Poulenc, en hommage à Mozart (dans le deuxième mouvement).

« Dans le Larghetto de ce concerto je me suis permis, pour le thème initial, un retour à Mozart parce j'ai le culte de la ligne mélodique, et que je préfère Mozart à tous les autres musiciens. Si cela commence alla Mozart, cela ne tarde pas d'ailleurs à bifurquer, dès la réponse du second piano vers un style qui m'était familier à l'époque. »

Francis Poulenc, Entretiens avec Claude Rostand

 

 

Le Tombeau de Couperin, 1914-1917 de Maurice Ravel (1875-1937) en hommage à François Couperin (1668-1733), compositeur baroque français

 

 

Danza Rustica, 1923, Ottorino Respighi (1879-1936)

 

Suite No. 1 de Cydalise et le Chèvre-pied : II. La leçon de flûte de Pan, 1932, Gabriel Pierné (1863-1937)

 

 

Symphonie n°1 dite classique, 1917, Serge Prokofiev, (1891-1953)

 

Suite Holberg, 1884, Edvard Grieg (1843-1907)

La Suite Holberg, Op. 40, plus précisément Du temps de Holberg, Suite dans le style ancien, op. 40 est une suite instrumentale en cinq mouvements écrite par Edvard Grieg afin de célébrer le bicentenaire de la naissance du dramaturge et auteur danois Ludvig Holberg, né en 1684 dans la même ville que Grieg, Bergen en Norvège. L'œuvre présente un découpage proche des structures habituelles dans ce type de forme musicale, telles que le XVIIIieme siècle les avait largement pratiquées :

Praeludium
Sarabande
Gavotte
Air
Rigaudon


Quoique l'œuvre ait été écrite à l'origine pour piano (instrument dont Grieg était virtuose), de nos jours la version la plus célèbre de cette Suite est la transcription pour orchestre de cordes effectuée par Grieg lui-même. On remarquera sans difficulté les analogies entre cette musique et certaines suites baroques de Jean-Sébastien Bach, contemporain de Holberg, ainsi que les accents folkloriques norvégiens particulièrement présents dans le rigaudon, éléments essentiels dans l'œuvre de Grieg.