Les Indes Galantes
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Jean-Philippe RAMEAU naît en 1683 à Dijon, ville où son père est organiste à la Collégiale St Etienne, et va effectuer des études très médiocres dans un collège jésuite :« Pendant les classes, il chantait ou écrivait de la musique et ne passa pas la quatrième » . Son père va alors l'envoyer faire un voyage d'études en Italie afin d'embrasser une carrière musicale. Ce séjour ne durera que quelques mois et il n'ira pas plus loin que Milan. Rameau va mener jusqu'à l'âge de 47 ans une carrière itinérante, gagnant sa vie en occupant différents postes d'organiste : Avignon, Clermont-Ferrand, Paris, Dijon, Lyon … puis s'installe définitivement à Paris en 1723 ( il est également violoniste et claveciniste). Il y mourra en 1764, à l'âge de 81 ans, après avoir été anobli, reçu une pension de la cour ainsi que la titre de compositeur du cabinet du roi. De nombreuses célébrations dans plusieurs ville du royaume feront écho à son inhumation en l'église Saint-Eustache.
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Portrait de Louis XV
Installé à Paris en 1723, Jean-Philippe Rameau se distingue autant comme compositeur que comme théoricien. En effet, il a publié l'année précédente son Traité de l'harmonie (1722).
Il faire une rencontre très importante, celle du fermier général et mécène, Monsieur de La Pouplinière. Celui-ci va lui ouvrir son salon, lui faire rencontrer Voltaire, devenir son ami, lui permettre de diriger son orchestre et surtout lui ouvrir les portes de l'Académie Royale de Musique.
L 'Académie Royale de Musique a été créée sur proposition de Colbert et a été dirigée par Lully dès 1672 : elle a pour mission de produire des divertissements en langue française pour la Cour, et de susciter le goût de la musique dans le public. Elle travaillera en étroite collaboration avec l'Académie française et l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres jusqu'en 1793, date à laquelle la Convention Nationale supprimera toutes les académies et sociétés savantes.
Rameau, attiré par la scène car il travaille déjà pour les spectacles de la foire Saint-Germain, part en quête de livrets : sa première tragédie lyrique, Hippolyte et Aricie, sera créée à l'Académie Royale de Musique en 1733. Rameau a alors 50 ans. L'œuvre, très remarquée, va donner lieu à une controverse entre les défenseurs de la musique de Lully qui trouvent qu'elle est trop complexe, trop savante, trop difficile à jouer et à écouter, et ceux qui sont séduits par les nouveautés apportées par Rameau (querelle des Lullistes et des Ramistes). Mais cette tragédie lyrique, inspirée de Phèdre de Racine, contribuera à établir la réputation du compositeur.
En 1745, Louis XV le nomme compositeur de la Musique de Chambre (Musicien officiel de la Cour).
La querelle des Lullystes et des Ramistes (ou querelle des Anciens contre les Modernes) est une controverse esthétique qui secoua le monde musical parisien à partir de 1733 et qui opposa les défenseurs des traditions de l'Académie royale de musique, fidèles à l'esthétique de Jean-Baptiste Lully, et considérant le style de Rameau comme trop « italien », aux partisans de celui-ci, éblouis par son génie et reconnaissant la richesse et la complexité de cette nouvelle musique.
FOCUS SUR LA QUERELLE : UN EXPOSE
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Décidément, Rameau n'a pas de chance. Le voilà à nouveau embarqué dans une querelle !
FOCUS SUR LA QUERELLE DES BOUFFONS : UN EXPOSE
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En 1752 éclate la Querelle des Bouffons, à la suite de laquelle Rameau se fâchera avec La Pouplinière. Cette querelle est déclenchée par une représentation donnée par les « Bouffons », troupe de chanteurs et comédiens italiens, de La Serva Padrona de Pergolèse. Elle va opposer le style français et le style italien.
Le style français est défendu par Rameau |
Le style italien est défendu par Rousseau |
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Pendant plusieurs années, de virulents échanges épistolaires vont circuler entre Rameau et ses détracteurs, Rousseau, Diderot, Grimm (les Encyclopédistes). Citons par exemple la Lettre sur la musique française, de Rousseau, et la réponse de Rameau, Erreurs sur la Musique dans l'Encyclopédie.
Ecoutons ici le récit sur France Musique
Et enfin, la fameuse Serva Padrona de Pergolesi
FOCUS : chaque élève prévoit de présenter une oeuvre de Rameau, choisie dans le genres suivants :
2 élèves pour 2 extraits de musique pour clavecin
2 élèves pour 2 extraits de musique pour piano (attention, piège !)
2 élèves pour 2 extraits de cantate
2 élèves pour 2 extraits de musique lyrique
2 élèves pour 2 extraits de textes sur la théorie
2 élèves pour 2 extraits de musique de chambre
2 élèves pour 2 extraits de motets
Il a écrit de nombreux ouvrages théoriques dont le Traité d'harmonie (1722). C'est le premier traité de théorie musicale, fondamental dans le développement de la musique occidentale. Rameau y pose les bases de l'harmonie classique et de la tonalité (Notion de basse fondamentale, notion de renversement d'accords, importance de l'accord parfait Majeur et de l'accord parfait mineur.
Il a aussi écrit beaucoup d'autres écrits sous la forme d'ouvrages, de lettres, de pamphlets...
La première mention du chef Chicagou (chef améridien) date de 1725. Sa visite à Paris a été relatée dans l'édition de décembre de 1725 du Mercure de France. La Compagnie du Mississippi avait été chargée de le faire venir en France avec cinq autres chefs. Les chefs ont rencontré le Roi Louis XV le 22 novembre. Le Mercure de France indique que Chicagou a fait un discours au jeune roi français promettant la fidélité à la couronne. Le jour suivant, le roi a emmené les chefs pour une chasse au lapin.
C'était pendant que les chefs étaient à Paris que Jean-Philippe Rameau a assisté à une performance donnée par eux au Théâtre italien. À cette occasion, ils ont dansé trois sortes de danse : la Paix, la Guerre et les danses de la Victoire.
Le chef Chicagou, aussi connu comme Agapit Chicagou, était un chef amérindien du XVIIIe siècle. Il était chef des Mitchigameas. Il a visité Paris et a participé aux guerres des Chicachas.
Suite à la découverte des danses indiennes, Rameau a écrit un morceau pour clavecin intitulé Les Sauvages qui a été plus tard publié dans les Nouvelles suites de pièces de clavecin (1728)
A B A C A : forme couplet refrain
Partie B reprend le début de A transposé.
Marche harmonique
Nuance forte
Tempo : allegro
Ornements
Clavecin
Phrases conclusives/suspensives
Cadence parfaite
En 1736, Rameau rajoute une 4ème entrée à son opéra-ballet Les Indes Galantes composé en 1735 : il l'appelle également Les Sauvages et y orchestre et transforme cette pièce pour clavecin pour en faire pour la dernière scène celle du Grand Calumet de la Paix (Ballet, duo et chœur).
Au début on observe l’entrée de ballet : 7 danseurs synchro aux gestes répétitifs. Ils portent d’énormes masques traditionnels. La joueuse de tambour est déguisée en indienne. Il y a 7 personnages qui ressemblent plus à des occidentaux qui passent derrière 3 fois. Ensuite le chœur et les deux solistes entrent et ils chantent tout en faisant des allers retours sur la scène avec des mouvements saccadés.
"L'opéra-ballet, un opéra en forme de ballet" (Paul-Marie Masson)
L'opéra-ballet est créé par André CAMPRA (1660-1744) L'Europe Galante en 1697.
Deuxième opéra de Rameau après Hippolyte et Aricie, Les Indes galantes appartiennent à un genre hybride, l’opéra-ballet, qui a longtemps été le concurrent de la tragédie lyrique. A la différence de celle-ci, l’opéra-ballet n’accorde qu’une importance relative à l’action dramatique, il n’est que prétexte au divertissement où triomphent la danse et la musique pure. Selon la définition de Cahusac (1754), il est considéré comme ” un spectacle de chant et de danse formé de plusieurs actions différentes toutes complètes et sans autre liaison entre elles qu’un rapport vague et indéterminé “. C’est la raison pour laquelle les différentes parties ne sont pas appelées ” actes “, ce qui supposerait le développement d’une histoire, mais ” entrées “. De cette manière, on pouvait aussi, selon le goût du public ou des disponibilités financières des directeurs de théâtre, couper ou ajouter de nouvelles entrées, comme ce fut le cas pour Les Indes galantes, auxquelles Rameau rajouta d'abord une 3ème entrée quelques jours après sa création, puis une 4ème entrée un an après la création. Sur le plan du sujet, l’opéra-ballet préfère le voyage et l’exotisme à la mythologie, les sujets contemporains à l’éloignement dans le passé, les personnages humains aux dieux. Faisant suite à la rigueur du Grand Siècle, il relève d’une société du loisir... Rameau en composera 6, sans compter les ballets et autres formes voisines. La danse y occupe dons une place importante, tout comme la musique qu'il présente sous forme d'ouvertures, de symphonies, d'airs de danses....
Ce qui est emprunté à l'opéra |
Ce qui est emprunté au ballet |
La structure : |
- La danse : 2 aspects . la pantomime : « théâtre muet » où les danseurs font des mimiques sur la musique. . les danses de l'époque : menuets, gavottes, bourrées, chaconne... |
Les différents opéras à l'époque baroque :
→ l'opéra seria (sérieux) sujets mythologiques , s'apparente à la tragédie ex : Orféo Monteverdi (1607)
La tragédie lyrique est la version française de l'opéra seria italien ( Lully, Rameau)
L'opéra-ballet garde la majesté de la tragédie lyrique, mais en plus léger. Autres sujets.
→ l'opéra buffa ( comique) sujets plus légers, personnages de la vie de tous les jours ex : La Serva Padrona de Pergolese ( 1732)
Les Indes Galantes développent quatre intrigues « galantes » différentes, dont le seul lien est l'exotisme, sujet très en vogue au XVIIIème siècle où l'on raffolait de « Turqueries « et de « Perseries ». Il s'agit avant tout de varier les lieux et les ambiances tout en privilégiant la danse et en déployant un éventail de situations et d'émotions.
Au XVIIIème siècle, il y a deux « sortes » d'Inde : les Indes orientales (Turquie, Perse…) et les Indes Occidentales (Amérique du nord, du sud...) Ainsi, chaque entrée, dans une « Inde » différente, propose une histoire pleine d'exotisme, liée au thème de la galanterie et de l'amour.
Les jeunes gens des 4 nations, France, Italie, Espagne et Pologne, délaisseront les « paisibles retraites » pour le combat et s'envoleront loin de l'Europe, sur les rivages des Indes (Turquie, Pérou, Perse, Amérique) où se dérouleront quatre péripéties amoureuses. On retrouve donc dans cette œuvre tous les sujets à la mode au XVIIIème siècle : galanterie, exotisme, nature, et évidemment le mythe du Bon Sauvage qui est au cœur de l'intrigue dans cette entrée.
Le mythe du bon sauvage, qui s'est constitué suite à la découverte de l'Amérique, est l'idéalisation des hommes vivant en contact étroit avec la nature.
Scène 1 : Adario s'inquiète car ses deux rivaux, Damon et Alvar, veulent séduire la belle Zima dont il est épris.
Mise en scène |
Musique |
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Scène 1 |
Cage lumineuse dans laquelle se trouve Adario. 4 soldats tout autour qui dansent. |
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Scène 2 : Arrivée de Alvar et Damon : celui-ci vante l'inconstance en amour.
Mise en scène |
Musique |
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Scène 2 |
Les deux sont à l’extérieur de la cage. Ils sont vêtus comme des guerriers. |
Air puis récitatif entre DAMON, ALVAR : « Damon, quelle vaine espérance » La scène s’arrête sur Alvar apercevant Zima. |
Scène trois : Arrivée de Zima. Alvar et Damon tentent de la séduire mais ils sont éconduits. Alaver est trop sérieux en amour, Damon ne l'est pas assez.
Mise en scène |
Musique |
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Scène 3 |
Apparition de pom-pom girl hip-hop (tenue brillante et dorée, casquette) Les 5 pom pom girl représentent Zima (une seule chante les autres sont en play back). Elles dansent. Au 3ème tableau Zima apparaît seule. Les 4 autres pompom grils apparaissent sur la cage (Grand écart, comme pour se moquer des deux prétendants) puis elles viennent destabiliser les soldats aux 4 coins de la cage, puis les font sortir de sècne. Zima finit sur la cage (symbole de domination ?) |
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Scène quatre : Zima leur préfère Adario. Ceux-ci acceptent sa décision.
Mise en scène |
Musique |
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Scène 4 |
Adario apparaît dans la cage. |
ALVAR, ZIMA, ADARIO, DAMON : « Que vois-je ? » : récitatif entre les 4 personnages. Beaucoup d’ornements. |
Scène cinq : Air, puis duo d'amour entre Zima et Adario.
Mise en scène |
Musique |
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Scène 5 |
La scène commence avec Adario (toujours dans la cage) et Zima à l’extérieur. |
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Scène six : La Fête du Calumet de la Paix, avec air, duo, choeurs et danses, scelle l'union de Zima avec Adario en même temps que la réconciliation entre les peuples.
Mise en scène |
Musique |
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Scène 6 |
Tapements de pieds qui soulignent la pulsation. |
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“ - On peut aussi considérer comme transcription certaines interpretations, notamment celles qui utilisent des instruments modernes non connus du temps de Rameau, comme dans le cas du piano.
A. Tharaud a le souci d’une interprétation historiquement informée qu’il impose dans les articulations, les phrasés ou les ornements (quoique ils soient parfois mécaniques et que quelques tremblements sont pris par la note réelle). Le diapason est moderne, différent des versions sur instruments anciens privilégiant ceux en usage au XVIIIe siècle.
Même si Tharaud respecte l’esprit de l’œuvre (une danse), il lui imprime aussi une interprétation plus personnelle notamment par ses accents rythmiques. La main gauche, par exemple, ressort parfois plus fortement, mettant en valeur un certain aspect percussif.
Son apport principal consiste en la création de plans sonores contrastés grâce au toucher et aux nuances. Le 2e couplet par exemple se présent piano et dans une sonorité plus argentine, comme s’il évoquait un orchestre imaginaire avec des flûtes et violons en sourdine à l’image de l’orchestre de l’Opéra au XVIIIe siècle. »
– Michel Corrette (1707-1795) s’empare à son tour de l’air des Sauvages, pour en donner des variations dans le genre qu’il affectionne, le « concerto comique ». Le 25e Concerto s’appelle « Les Sauvages et La Furstenberg », et est édité en 1773 environ
« Un dernier exemple permet d’illustrer la fortune de ce « tube » de Rameau et son traitement musical : il s’agit de Here In This Place de Iko et l’Ensemble Private Domain avec Marc Collin, Paul & Louise (d’après Les Indes galantes de Rameau, « La danse des sauvages »). Il s’agit d’une réalisation électro pop donné à la Cité de la musique en 2009 :
*un ostinato de batterie en binaire efface la basse si vivante et si étrange de Rameau.
*l’interprétation par l’orchestre baroque privilégie un hyper legato, sans rythmique de danse.
*la présence de « nappes » électroniques et de sons tenus à la fin occulte la dynamique de danse.
D’où un affaiblissement de la portée « sauvage » et originale de la pièce.
Qui est IKO ?